Appel à contribution pour le numéro 20 - Revue Criação & Crítica

2017-09-24

Les fragments de Sappho s’écoulent de la mer Egée vers le continent ; à la merci du vent, ils parcourent un long chemin, traversant le temps et l’espace. Des fragments provenant de l’île qui a donné son nom : Lesbos. Dans le livre Brouillon pour un dictionnaires des amantes, de Monique Wittig, la page concernant Sappho est laissée en blanc. À son propos, on ne sait presque rien. Mais on sait ceci : elle a existé.

Un jour, dans une salle de classe, quelqu’un a demandé s’il y avait une écriture lesbienne ou des livres lesbiens. « Il y en a », a répondu Nicole Brossard. Il y en a et  « ce sont quand-même de beaux livres, assez intelligents, émouvants, qu’on ne remarque pas forcément, à l’exception de celle qui, en les trouvant, reconnaît le frisson et le grain d’une voix amoureuse, qui tout d’un coup respire comme si l’air ambiant perdait de sa lourdeur quotidienne, qui se surprend et s'interroge, comme si un tas de mots pouvait la raprocher davantage de sa propre histoire ». On le sait : ces livres existent.

Aussi, Brossard a écrit qu’« une lesbiene qui ne réinvente pas le monde est une lesbienne en voie d’extinction ». Donc, la page blanche sur Sappho, énigmatique et vide, est source de création. Venus du vent et des courants de l’Égée, ses morceaux de papier sont recueillis dans les continents - des grains de voix qui permettent de mieux respirer. C’est l’invention de Sappho, puisque, on le sait : elle a existé.

Être née dans une île, a écrit Yourcenar, c’est sûrement un début de solitude. Non, aurait dit Adrianne Rich, puisqu’il y a un continuum lesbien qui permet à la personne lesbienne de dépasser n’importe quel espace et traverser n’importe quel temps, survivant ainsi à sa rencontre avec les autres personnes lesbiennes. Elle résiste à sa propre extinction. Dans les vers d’Anne Carlson, dans les bandes-dessinées d’Alison Bechdel. Dans La Couleur pourpre, d’Alice Walker. Dans Le Puits de la solitude, de Radclyffe Hall. Avec Martha qui, chez Audre Lorde, refuse la mort. Chez Cassandra Rios, qui, d’emblée, dans le titre de son livre, dit : Eu sou uma lésbica  ( « Je suis une lesbienne » ). Dans Le Corps lesbien, de Monique Wittig, qui crie « Gloire à Sappho ! Gloire à Sappho pour le temps qu’on a vécu dans ce sombre continent ». La littérature lesbienne, on le sait : elle existe.

La revue acceptera des articles académiques en portugais, en français, en espagnol et en anglais, ainsi que des comptes-rendus, des traductions et des exercices de style (c’est-à-dire, des textes qui se situent entre la critique et la littérature). Veuillez bien soumettre votre texte en ligne, en suivant les normes de la revue , jusqu’au 30 Septembre 2017.